Vous souhaitez faire l’acquisition d’une propriété et vous vous demandez si vous devez retenir les services d’un inspecteur en bâtiment afin de réaliser une inspection préachat ? Est-ce obligatoire ? Qu’arrive-t-il si vous ne mandatez pas d’inspecteur et que vous faites par la suite la découverte de ce qui semble être un vice caché ?
L’article 1726 du Code civil du Québec, qui prévoit qu’un vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien vendu est exempt de vice caché, répond également à ces questions. En effet, l’alinéa 2 de l’article indique qu’un vendeur n’est pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent, lequel est un vice pouvant être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
Ainsi, il n’existe aucune obligation légale de mandater un inspecteur préachat ; un acheteur doit plutôt se comporter de manière prudente et diligente afin de déceler les vices potentiels.
Que signifie toutefois cette notion d’acheteur « prudent et diligent » ?
La jurisprudence a maintes fois eu l’occasion de répondre à cette question. Dans la décision Lavoie c. Comtois [1], la Cour supérieure énonce la définition suivante :
« L’acheteur prudent et diligent d’un immeuble procède à un examen visuel attentif et complet du bâtiment. Il est à l’affût d’indices pouvant laisser soupçonner un vice. Si un doute sérieux se forme dans son esprit, il doit pousser plus loin sa recherche. D’une part, on ne peut exiger d’un acheteur prudent et diligent une connaissance particulière dans le domaine immobilier. D’autre part, on ne peut conclure au vice caché si le résultat d’un examen attentif aurait amené une personne prudent et diligente à s’interroger ou à soupçonner un problème. »
L’acheteur prudent et diligent n’a donc pas une obligation de résultat, c’est-à-dire qu’il n’a pas à détecter tout vice potentiel ni détenir de connaissances spécifiques en matière immobilière. Il doit cependant faire inspecter l’immeuble par un professionnel dès qu’il détecte des indices pouvant laisser soupçonner l’existence d’un problème[2].
De plus, certaines circonstances font en sorte qu’un acheteur doit redoubler de vigilance. Par exemple, dans l’arrêt Paulin c. Gauthier[3] rendu par la Cour d’appel, on peut lire que « l’acheteur devra être plus vigilant selon la vocation de l’immeuble ; un immeuble à vocation commerciale ou industrielle devra le conduire à un examen plus minutieux qu’un immeuble à vocation résidentielle ». La Cour indique également que « l’acheteur prudent et avisé doit examiner très soigneusement un vieil immeuble ; ne pas examiner les effets de l’âge sur les composantes peut constituer une imprudence ».
On peut donc constater que l’évaluation de la notion d’acheteur prudent et diligent se fait au cas par cas, en fonction des indices présents et des caractéristiques de l’immeuble.
Dans ces circonstances, bien que cela ne soit pas obligatoire, nous vous recommandons de retenir les services d’un inspecteur préachat.
Cela peut être doublement bénéfique car un tel professionnel peut détecter des problématiques que vous n’auriez pas été en mesure de détecter et ainsi, vous éviter d’exercer un recours pour vices cachés qui peut s’avérer coûteux et fastidieux.
D’autre part, si vous vous retrouvez aux prises avec une problématique de vice caché alors qu’un inspecteur aurait dû déceler le vice ou vous formuler une mise en garde quant à une potentielle problématique, la responsabilité de ce dernier pourrait être retenue et il sera facilitant pour vous d’être indemnisé si ce dernier détient une assurance responsabilité professionnelle.
Ainsi, avant de retenir les services d’un inspecteur, nous vous recommandons fortement de vous assurer que ce dernier détient une telle assurance.
[1] Lavoie c. Comtois, 1999 CanLII 11787 (QC CS).
[2] Sauveur c. Cotton, 2012 QCCS 2421.
[3] Paulin c. Gauthier, 2014 QCCA 1897.